vendredi 19 février 2010

THELMA SANS LOUISE

J'y suis allé par sympathie pour la chanteuse Cristina Sgobba, une amie de mes enfants, et pour le metteur en scène Eric De Staercke. J'ai non seulement passé une bonne soirée - j'avoue avoir beaucoup ri - mais je trouve ce spectacle intelligent et très populaire, au sens le plus noble du terme.

On est très loin du simple récital de country, même si c'est cette musique qui est à l'honneur. La grande présence des deux musiciens (qui se révèlent d'excellents comédiens dans le genre) y est pour beaucoup. Patrick Joniaux (contrebasse) et Pierre Poucet (guitare) apportent leurs commentaires, plaignent la chanteuse, se moquent par autodérision du genre où plus c'est triste, mieux ça cadre, etc. En jouant sur les tempos, ils finissent par colorer cette musique de bleus au coeur et de souffrance affective en jaune soleil et en rouge bonheur. On sent évidemment la patte magique d'Eloi Baudimont qui a assuré la direction musicale.
Mais bien sûr je m'en voudrais de ne pas signaler aussi la belle voix de Cristina et sa manière personnelle de  la maîtriser. Au jeu des comparaisons, elle rejoint pas mal de grands noms qui font vibrer les amateurs de pop-blues.
Bref, je recommande. Chaleureusement. Au public et aux programmateurs qui n'ont pas peur des frontières douteuses entre le théâtre et la musique.
Et je ne suis pas le seul puisque Catherine Makereel, du Soir, partage chaleureusement ce point de vue que je ne résiste pas à reprendre in extenso (j'espère qu'elle ne m'en voudra pas).
La country de Thelma sans Louise, c’est une balade sans les bottes blanches et les vestes de daim à franches, c’est un doux crépitement sans l’ambiance feu de camp, c’est le blues sans le coup de blues, c’est un voyage le long des autoroutes et des bandes FM américaines sans les poses, le Stetson, et le racisme d’un genre musical plus blanc que Blanc.
Bref cette comédie musicale, mise en scène par Eric De Staercke, c’est un style qui sait se moquer de lui-même tout en offrant un tour de chant stimulant.
Patrick Joniaux à la contrebasse et Pierre Poucet à la guitare donnent le ton de la dérision, débarquant, un peu ahuris, sur la scène des Ecuries, espace approprié pour accueillir une « lonesome cowgirl ». L’un se rend compte qu’il a oublié ses santiags, l’autre dérape et confond country avec sirtaki, autant dire que ces deux accompagnateurs jouent de l’humour comme des notes de musique. Grâce à leurs régulières interruptions, consolant la chanteuse entre deux spleens soyeux, se moquant de sa malchance ou livrant de cocasses traductions aux ritournelles américaines, le blues prend ici des teintes rosées tandis que Cristina Sgobba enchaîne une vingtaine de chansons, empruntées à Emmylou Harris, Maria Mac Kee, Alannah Myles ou Linda Ronstatd.
Une constante évidemment : les hommes, décidément peu doués pour l’amour. Qu’elles soient trompées, mal aimées, abandonnées, les femmes exorcisent leur mal de vivre.
Une mélancolie que Cristina Sgobba déverse avec une infinie chaleur dans la voix, une sensualité à la Norah Jones et une espièglerie bien dosée. Elle sait aussi se moquer du côté neurasthénique de la country, se transformant en juke-box de tubes insouciants ou mimant la crise de nerfs en pleine interprétation. Thelma a décidément largué Louise et sa country fait voler la poussière.

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