Balade dans le jardin d’Alfred Dogbé – Hommage rendu au Tarmac le 14 mars 2012
Mon cher Alfred,
A
11h, Charline Grand, qui fut certainement ton amie française la plus
proche, m’a envoyé un SMS pour m’annoncer sa venue au Théâtre Le Tarmac.
Elle brûlait de me parler, et moi aussi. Nous n’en pouvions plus,
chacun dans son île, de ressasser tant de ces beaux souvenirs qui font
si mal. « Je suis sûre que s’il nous voit d’en haut ça lui fera plaisir…
A tout à l’heure, j’espère ». Nous nous étions seulement croisés à
Niamey, dans la nuit d’un théâtre improvisé de plein air, à la fin de
« A l’étroit », qu’elle avait mis en scène.
A
la fin de l’hommage qui t’était rendu, nous nous sommes retrouvés et
nous avons parlé de toi longtemps, longtemps qui était si court.
Charline m’a raconté des tas de choses de toi qu’elle seule sait. Dix
ans d’amitié et d’étroites collaborations… Vraiment, Alfred, quelle
belle amie tu tiens là ! Je suis bien certain, en effet, que tu étais
content « là-haut », en épiant notre conversation ! Bien sûr nous avons
aussi envisagé, avec une si grande difficulté, l’avenir ! Tout ce qu’il
était possible de faire pour aider ta famille et rassembler toutes les
traces que tu as laissées ici et là !
Quant
à l’hommage ordonné par Emile Lansman, ça aussi cela a dû te faire
plaisir ! On avait l’impression que tu étais devenu un auteur
classique ! Trois excellents comédiens ont lu des nouvelles et des
extraits de tes pièces. Et les spectateurs riaient ! Etrange, mais
logique, paradoxe. Cette compilation vivante, et inédite, était parfaite
pour saisir d’un seul coup la cohérence de ton style et de tes idées.
Très drôle, en effet, mais quelle cruauté ! On dirait que tu t’es
acharné, toute ton aventure durant, à mettre ainsi à nu les maux les
plus durs de la société nigérienne. Quelle efficacité ! Du miel pour un
acteur ! Emile Lansman nous a raconté aussi qu’au tout début de ta
carrière d’écrivain professionnel, personne ne donnait cher de ton
avenir de dramaturge. Cela m’a bien fait rigoler car je sais bien que
l’exercice de la nouvelle était ce qui te satisfaisait le mieux –
intimement -, que cette forme était la traduction la plus pure de ton
ambition littéraire : le fantastique social au scalpel. On y reviendra,
n’est-ce pas ? Le plus juste serait bien de rassembler en un seul volume
toutes celles que tu as disséminées.
Dans
ce tout petit moment, modeste et juste, il s’est passé également des
choses d’importance considérable : les responsables du TGP, François
Lecour (très fraternel) et Nathalie Pousset, nous ont fait savoir qu’ils
avaient obtenu une aide de la SACD pour payer la scolarisation de tes
enfants durant trois ans ! Quel immense soulagement ! Nous leur
témoignerons longtemps notre reconnaissance !
Monique
Blin, avec qui tu as travaillé depuis très longtemps, était là aussi et
elle avait choisi, avec beaucoup de pertinence, de lire des notes que
tu lui avais adressé sur ton travail en cours : une chronique, en fait,
de ton immersion sociale. J’espère que Monique Blin nous fera parvenir
bientôt ces textes, qui en disent beaucoup plus long que tout autre
chose sur ton engagement politique, ta bataille contre l’hypocrisie et
la servitude volontaire vendue par les idéologies.
Daniel Mallerin
Retrouvez ce texte et bien d'autres contributions autour de la personnalité d'Alfred Dogbé sur le blog http://pouralfreddogbe.blogspot.com/
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire